Comprendre la dualite
Dans les textes anciens et les différentes traditions, on retrouve la notion de dualité comme principe constitutif du monde.
- Dans la cosmogonie (sur la création du monde) d’après les Rig-Vedas, la graine est placée dans l’eau. L’eau est peut-être un principe féminin tandis que la graine serait un principe masculin.
- En métaphysique, d’après le Samkhya, le nom d’une école philosophique dont les textes sont très liés aux sutras de Patanjali pose le dualisme dans ces termes :
Purusa : principe masculin, pure conscience, il ne peut pas interagir avec le monde, il n’a pas de pouvoir/puissance
Prakratti : principe féminin, puissance, potentialité, vie et fécondité (tout ce qui n’est pas purusa, le pure conscience). Comme un lac de potentialité qui se met en mouvement en union avec purusa. La création est quand purusa entre en contact avec prakritti. Dans ce concept métaphysique, la libération vient de l’union de ces deux principes cosmiques primaires, du masculin et du féminin.
- Tantra Hindou : l’élément masculin est passif, l’élement féminin est actif et représente la force/ la puissance, shakti. Le tantra est l’élaboration de cette métaphysique du Samkhya.
- Bouddhisme : le principe féminin est passif et représente la sagesse (prajna), le principe masculin est actif et représente la compassion et les moyens/talents. La sagesse, féminin, permet la discrimination entre le faux et la vérité ultime ; la compassion, masculin, permet d’emmener les mortels vers l’illumination. On retrouve la métaphore de l’union des corps du Bouddha et des boddhisattvas dont le but est de rejeter tout sens de l'individualité personnelle et de s’unir avec le divin. Dans certains courants du bouddhisme, on peut retrouver cette métaphore de l’union sous la forme de père/mère voire de grand-père/grand-mère.
Dans la lignée du Tantra Hindouisme, Shakti est devenu le terme générique pour toute énergie. C’est le divin au féminin présent dans tout ce qui existe. C’est à la fois une divinité qui peut être appelée la Grande Mère Divine ou la Mère Universelle et la forme d’énergie primordiale qui régit le monde. Dans le tantra, Shakti est vénérée comme le féminin divin qui imprègne chaque être vivant et chaque divinité d'énergie, de puissance et de créativité.
Le Tantra traditionnel célèbre le féminin cosmique sous toutes ses formes jusqu’à la pure Conscience, elle-même dotée des qualités féminines d’ouverture, de tendresse, d’affection et de compassion.
Quelque que soit les traditions, il ne s’agit que de métaphore pour représenter la dualité et non pas la classification selon les genres. Les caractéristiques de chaque pole ne sont pas figées, on le voit bien. Ce qui a défini les métaphores de genres sont des conceptions sociales du genre. Dans le culte de la Déesse ou des Déesses, on n’adule par les formes féminines puisqu’elles contiennent à la fois le féminin et le masculin selon des normes sociales. Par exemple Durga qui incarne à la fois la maternité et la férocité.
C’est l’opposition des pôles et leur dépassement qui prévaut et qui réunit les différentes visions : l’ultime n’est ni féminin, ni masculin. L’objectif est « l’union bienheureuse de Shiva et de Shakti, l’union du féminin et du masculin, de la conscience et de l’énergie. » (Jung, Psychologie de la Kundalini)
Le corps yogique incarne cette dualité.
IIa et Pingala, Ida étant le principe féminin et Pingala, le principe masculin, se croisent à chaque chakra.
Ida : le Nadi lunaire – Chandra nadi.
Il monte le long du côté gauche du corps, touche les six premiers chakras et se termine dans la narine gauche.
L’énergie du prana prend une charge magnétique négative, acquérant des qualités lunaires, froides et pures.
Cette énergie est mentale, introvertie et peu intéressée par l’action pratique, mais plutôt intuitive et profonde, elle est reliée au côté gauche du corps et au lobe droit du cerveau. Il permet également la connaissance de l’ensemble du système provenant du féminin (archétype) ; il s’agit d’un héritage biologique maternel provenant de l’ovule, et le samyama donne accès à ce plan entier, avec le potentiel conséquent d’y opérer. Il contrôle les processus mentaux et est relié au système nerveux parasympathique.Pingala : le Nadi solaire – Surya nadi.
Il monte le long du côté droit du corps, touche les six premiers chakras et se termine dans la narine droite.
L’énergie du prana prend une charge magnétique positive, acquérant des qualités solaires, desséchantes et chaudes.
L’énergie est active, dynamique, forte, extravertie, connectée au côté droit du corps et au lobe gauche du cerveau.
Il privilégie l’analyse objective et pratique, mais possède peu d’intuition. Il permet également la connaissance de l’ensemble du système provenant du masculin (archétype) ; c’est un héritage biologique paternel provenant du spermatozoïde, et le samyama (la pratique combinée simultanée de Dhāraṇā -concentration-, Dhyāna -méditation- et Samādhi) donne accès à ce plan entier, avec le potentiel conséquent pour y opérer. Il contrôle les processus vitaux et est relié au système nerveux sympathique.Les chakras accueillent l’union de Shiva et de Shakti.
Dans les représentations anciennes, Shiva et Shakti sont unis dans trois chakras (2ème, 4ème, 6ème). Les trois paliers où les pouvoirs masculin et féminin œuvrent de concert et au sommet de leur force correspondent aux trois stades de la vie érotique, de la vie créatrice, de la vie intuitive - d’où la présence du yoni et du linga. (Jung)Dans les images du culte, Shiva est également représenté en tant que Shiva-bindu (bindu: point, la graine, la conscience), c’est -à-dire, en tant que puissance de création latente sous la forme d’un point. Autour de Shiva-bindu, autour du ventre, réside la Shakti sous la forme d’une roue ou d’un chakra.
C’est l’union du triangle et du linga. On trouve à la fois l’idée que Shiva et Shakti s’unissent dans le chakra couronne et qu’alors on atteint la libération, et l’idée que Shiva et Shakti s’unissent, se rencontrent dans la matière, au niveau des chakras. Ce qui sous-entend la nécessité de l’équilibre de ces dualités à différents stades de la vie matérielle.
Quelques définitions en plus
Shiva est le pouvoir de transformation et de libération dans certaines traditions de yoga. C'est l'une des trois forces principales et est personnifiée dans le dieu hindou, Shiva, le transformateur et le destructeur du mal ; tandis que l'énergie féminine shakti est représentée par son épouse, Parvati (parfois appelée Mahadevi). On représente souvent Parvati comme la consort de Shiva, en réalité, Shiva étant la pure conscience, son opposé est la matière Shakti. Toutes les déesses sont différents aspects de Shakti. La nature de l'énergie de Shiva est inébranlable, stable, paisible, forte et totalement impassible avec une présence complète. Direction, but, liberté et conscience - ce sont nos qualités divinement masculines. L'énergie masculine de Shiva est consciente de tout ce qui entre dans la création. Shiva est l'être pur dans son immobilité. Shakti est un pur devenir dans tout son flux et sa créativité ainsi que dans son ouverture sans fin aux possibilités. La Kundalini correspond à la visualisation dans le corps de l’énergie Shakti Kundalini shakti, qui est considérée comme le pouvoir invincible, se trouve à la base de la colonne vertébrale. C'est un terme sanskrit qui signifie "pouvoir enroulé" et fait référence au "serpent endormi", qui, au réveil, entraîne la conscience de soi et la croissance spirituelle. Dans le yoga Kundalini, l'un des objectifs du praticien est d'éveiller la prakriti (ou l'énergie de la «mère nature») pour atteindre l'équilibre et éveiller son pouvoir primordial et atteindre un état d'être plus naturel.